Nécrologie : Le chantre de la négritude s'est tu


Le poète martiniquais Aimé Césaire est décédé hier à Fort-de-France en Martinique.
Dorine Ekwè, source : Wikipédia.Org

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"Il y a chez moi ce besoin de rugir parce que les Antillais, descendants d'esclaves, êtres déchirés, ont été opprimés, dépouillés de notre langue et de notre terre", disait Aimé Césaire en 1993. Le père de la négritude, décédé jeudi matin à l'âge de 94 ans ne rugira plus. Hospitalisé depuis le 9 avril 2008 au Chu de Fort-de-France pour des problèmes cardiaques, l'écrivain et homme politique martiniquais a finalement déposé sa plume. Pour les artistes de la francophonie, cités par Rfi, sa disparition est un deuil bien au-delà des seuls Martiniquais dont il fut le député pendant un demi-siècle.
L'homme qui vient de disparaître fut l'auteur du terme de "négritude " et du courant littéraire qui s'en est suivi, prônant la libération de l'homme noir qui, aux Amériques ou en Afrique, vivait sous la domination matérielle et mentale de la civilisation occidentale. C'est dans ce sens que pendant de longues années, il s'est battu pour l'autonomie de la Martinique.

Né en 1913 en Martinique, l'initiateur du concept de la " négritude " fait partie d'une famille de sept enfants ; son père est enseignant et sa mère couturière. Son grand-père fut le premier enseignant noir en Martinique et sa grand-mère, contrairement aux usages de l'époque, savait lire et écrire. Elle a d'ailleurs enseigné à ses petits-enfants la lecture et l'écriture. En septembre 1931, Césaire qui vient d'obtenir une bourse d'études arrive à Paris en tant que boursier du gouvernement français pour entrer au lycée Louis-le-Grand où, dès le premier jour, il rencontre Léopold Sédar Senghor, avec qui il noue une amitié qui durera jusqu'à la mort de ce dernier en décembre 2001.

Son arrivée à la métropole lui permettra, avec son ami, de découvrir, au contact des jeunes africains étudiant à Paris, la composante africaine, victime de l'aliénation culturelle caractérisant les sociétés coloniales de Martinique et de Guyane. En septembre 1934, Césaire fonde, avec d'autres étudiants antillo-guyanais et africains dont Léon Gontran Damas, le Guadeloupéen Guy Tirolien, les Sénégalais Léopold Sédar Senghor et Birago Diop, le journal L'étudiant noir. C'est dans les pages de cette revue qu'apparaîtra pour la première fois le terme "Négritude". Son ouvrage " Cahier d'un retour au pays natal" est publié en 1939. C'est à travers cet ouvrage qu'une génération d'élèves africains et camerounais de façon particulière s'est frottée au concept de la négritude à travers ce recueil de poèmes publié en 1939.

Durant la campagne de l'élection présidentielle de 2007, il soutient activement Ségolène Royal, y compris en l'accompagnant lors d'un meeting. "Vous nous apportez la confiance et permettez-moi de vous dire aussi l'espérance". Cette dernière, à l'annonce du décès du poète et maire a salué sa mémoire et demandé son entrée au Panthéon. Elle l'a présenté comme étant "Un éveilleur de conscience, un éclaireur de notre temps, un démineur d'hypocrisies, un porteur d'espoir pour tous les humiliés, un combattant inlassable de l'humaine dignité." Césaire aura droit en France à des obsèques nationales auxquelles prendra part le président français Nicolas Sarkozy.

Bibliographie
Œuvres complètes (trois volumes), Fort-de-France, Desormeaux, 1976.

Poésie
- Cahier d'un retour au pays natal, Paris, Présence africaine, (1939; 1960)
- Les Armes miraculeuses (1946; Paris, Gallimard, 1970)
- Soleil cou coupé (1947; Paris, Editions K., 1948)
- Corps perdu (gravures de Picasso), Paris, Editions Fragrance, (1950)
- Ferrements, Paris, Seuil, (1960; 1991)
- Cadastre, Paris, Seuil, (1961)
- Moi, laminaire, Paris, Seuil, (1982)
- La Poésie, Paris, Seuil, (1994)

Théâtre
Et les chiens se taisaient, Paris, Présence Africaine, 1958; 1997
- La Tragédie du roi Christophe, Paris, Présence Africaine, (1963; 1993)
- Une saison au Congo, Paris, Seuil, (1966, 2001)
- Une tempête, d'après La Tempête de William Shakespeare : adaptation pour un théâtre nègre), Paris, Seuil, (1969; 1997)

Essais
- Esclavage et colonisation, Paris, Presses Universitaires de France, 1948.
- Victor Schoelcher et l'abolition de l'esclavage, Lectoure, Editions Le Capucin, 2004.
- Discours sur le colonialisme, Paris, éditions Réclames, 1950 ; éditions Présence africaine, 1955.
- Discours sur la négritude, (1987).

Histoire
- Toussaint Louverture, La révolution Française et le problème colonial, Paris, Présence Africaine, (1962).

Entretiens
- Rencontre avec un nègre fondamental, Entretiens avec Patrice Louis, Paris, Arléa, 2004.
- Nègre je suis, nègre je resterai, Entretiens avec Françoise Vergès, Paris, Albin Michel, 2005.
- Aimé Césaire, Paris, Hatier, "Les Voix de l'écriture", 1994.

Son parcours politique
De 1945 à 2001 : Maire de Fort-de-France (durant 56 ans)
De 1945 à 1993 : Député de la Martinique
De 1983 à 1986 : Président du Conseil Régional de la Martinique
De 1945 à 1949 et 1955 à 1970 : Conseiller général de Fort-de-France
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