Mondialisation : Pourquoi l’Afrique n’est pas partie


Dans son dernier ouvrage, Joseph Kuiekem passe en revue les freins à l’essor économique du continent.

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Ce n’est pas écrit dans l’introduction, mais c’est tout comme: ceci n’est pas un court – ni même un long – traité d’économie appliquée à l’intention des érudits. Ce n’est pas non plus une recette miracle, du genre que conçoivent les sherpas des instances financières internationales à partir de leurs bureaux climatisés, qu’ils font appliquer aux républiques du Tiers-monde en proie à des crises structurelles et de gouvernance.
Avec «La mondialisation et l’Afrique, la fin des Etats ‘vaches à lait’» (Dianoïa), Joseph Kuiekem revisite un sillon tracé depuis 2006 chez le même éditeur avec «Immigration : le temps des solutions au Sud». Il s’agit donc de prendre le contrepied des dogmes édictés par les grands manitous de la finance internationale, dont les prescriptions aux grands malades sous ajustement structurel, parce que fondées sur des diagnostics «prêt-à-porter», ignorent les réalités du terrain et aboutissent le plus souvent à des résultats au mieux biaisés.

La mondialisation, selon l’auteur, est devenue cette hydre qui sacralise les forces du capital au mépris des forces du travail, les services marchands et le profit étant devenus le centre de toutes les attentions, et les plateformes non solvables affectées aux organismes humanitaires. Les mécanismes qui créent la pauvreté et la misère au Sud ne sont pas l’apanage des seuls responsables de cette ère géographique. En s’intéressant à l’extraversion des économies de l’Afrique noire, par exemple, il est indéniable que les investissements viennent de l’étranger où repartent les bénéfices. De même que les techniciens réputés de haut niveau, qui rapatrient le traitement financier tiré de leur travail.

Dans un style didactique et généralement dépouillé de formules ésotériques, Joseph Kuiekem passe en revue la situation de l’entreprise en Afrique, le dilemme des projets d’infrastructures, la vision mondiale de la nouvelle économie, les déséquilibres macroéconomiques et l’instabilité des entreprises, pointe les administrations publiques du continent comme étant les principaux freins au développement. La crise économique qui a lourdement frappé les pays du continent ne date pas du milieu des années 80, l’Afrique ayant présenté, bien avant, des signes d’une crise durable de ses entreprises publiques et parapubliques.

Selon Joseph Kuiekem, il ne suffit pas d’augmenter les budgets des secteurs productifs pour obtenir les résultats escomptés, mais davantage de disposer de projets de stimulation sectorielle à financer. Les systèmes d’imposition, parce que «transplantés», ont produit des effets pervers en Afrique noire qui ne peuvent conduire qu’à des résultats partiels, qui consistent à accroitre les recettes des Etats par le harcèlement du secteur moderniste, en laissant le secteur traditionnel mal exploité.Pour des pays exportant des produits bruts, qui importent plus qu’ils ne vendent à l’extérieur en monnaie constante, sont automatiquement frappés par la détérioration des termes de l’échange, subissent l’extraversion permanente des liquidités, ont des monnaies faibles, dépréciées ou dévaluées, la banqueroute guette à tous les virages. Autre paradoxe, et non des moindres : ceux qui gèrent aujourd’hui les Etats africains ont souvent été formés dans les meilleurs écoles dans leurs domaines respectif, censées former des hommes tournés vers la modernité. Mais l’auteur, par ailleurs administrateur de sociétés dans le civil, les voit plus dans le rôle de «véritables chefs traditionnels de leur village au cœur de l’Etat».

Félix C. Ebolé Bola

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