Ifrikiya


C'est l'histoire de trois jeunes gens qui ne sont au départ ni parents ni amis. ...

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C'est l'histoire de trois jeunes gens qui ne sont au départ ni parents ni amis. Le premier, Jean Claude Awono est diplômé de l'Ens de Yaoundé, Professeur de lettres ; il est passionné de poésie. Les deux autres : François Nkeme et Joseph Fumtim sont des produits de l'Ecole Supérieure des Sciences et Techniques de l'Information et de la Communication, l'Estic ; ils sont diplômés en édition. Ils ont en commun, tous trois, d'aimer la littérature et les livres. Jean Claude Awono a été révélé comme poète par Suzanne Olschwang, une française alors directrice des Presses Universitaires de Yaoundé.

Flux et reflux d'une foulée de fou, son premier recueil ne passe pas inaperçu. Le jeune poète prolonge sa passion pour la littérature et la poésie par des activités militantes. La Ronde des poètes, l'association qui regroupe des jeunes dont quelques uns sont de vrais parents de la Muse, multiplie les activités. Pour promouvoir ces jeunes auteurs, Awono crée une maison d'édition : les éditions de la Ronde. La qualité de certains de ses recueils et le sérieux qu'il met à leur préparation éditoriale lui vaut d'être sollicité pour diriger la collection poésie de Cle ; une collection est même créée : la collection Cle/Ronde pour promouvoir les jeunes poètes d'ici et d'ailleurs.

François Nkeme est d'abord connu comme l'auteur d'un roman qui, à ce jour, demeure le seul témoignage de ce que fut, pour de nombreux étudiants, l'université camerounaise des années 90, Le cimetière des bacheliers. Son roman paru sous ce titre il y a une dizaine d'années a fait l'objet d'au moins trois éditions à ce jour. Découvert par la suite par les instances de réception parisienne, il fait partie de la shortlist des plumes émergentes dressée par la revue Notre Librairie. Militant et acteur du secteur de l'édition, François Nkeme a lui aussi d'abord créé une association, Proximité, qui s'est vite transformée en maison d'édition avec comme spécialité le roman et la nouvelle. L'un de ses plus haut fait à ce titre, c'est la publication de Les Femmes ne boivent pas de whisky de Séverin Cécile Abéga.

On sent Joseph Fumtim, même s'il promeut de jeunes poètes lui aussi à travers sa maison d'édition, Interlignes, plus porté vers l'essai. Ses sorties dans la presse nationale ne sont pas sans pertinence. Il a le mérite d'avoir rapatrié des textes de la diaspora et publié localement deux grands noms de nos lettres : Gaston Kelman et Patrice Nganang. A côté des éditions de la Ronde et des éditions Proximité, il faut donc ajouter les éditions Interlignes, la maison située sur le flanc d'un immeuble de la montée du Collège Vogt à Yaoundé où Fumtim avait ses habitudes avant son recrutement par une institution de coopération de la place.

Trois jeunes, une même passion, trois sensibilités différentes mais complémentaires : voilà comment peut se résumer l'histoire des éditions Ifrikiya. Tout, objectivement, préparait Awono, Nkeme et Fumtim à conjuguer leurs efforts, leurs talents et leurs ressources. En les y encourageant de façon concrète, Jean-Michel Gimenez, l'ancien médiathécaire du Centre Culturel Français de Yaoundé, les a aidés à monter en puissance par le pouvoir magique de l'union. Après la fusion, leurs anciennes maisons sont aujourd'hui les noms des collections consacrées à la poésie, aux textes narratifs et aux essais de la maison d'édition Ifrikiya ; François Nkeme en est le gérant. Si l'on en juge par le nombre et la qualité des textes qui sont sortis de ses presses, la maison Ifrikiya est un fleuron de l'édition au Cameroun et un bel exemple de ce dont la jeunesse camerounaise est capable.


Par Marcelin VOUNDA ETOA*

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