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Affaire Bakassi : Les rescapés menacés de mort
Une garde renforcée à la garnison et au Bbr où les blessés récusent les enquêteurs.
Denis Nkwebo
Depuis trois jours, sept des quatorze rescapés de l’attaque du 12 novembre 2007 contre le poste de commandement numéro 3 de l’armée camerounaise dans le Rio Del Rey à Bakassi ont été exfiltrés de l’hôpital militaire de Douala. Leur sortie de la garnison, décidée selon diverses sources par le général Saly Mohamadou, fait suite à une rumeur qui circule dans les milieux locaux de l’armée, faisant état d’un complot visant à éliminer ces témoins de la tuerie qui a coûté la vie à 21 militaires à Bakassi. De source interne à l’armée, les responsables de la deuxième région militaire, face à la persistance de la menace, ont décidé de renforcer la garde autour de la garnison et au Bataillon blindé de reconnaissance (Bbr), unité de l’armée qui a enregistré à elle seule 13 des 21 morts du 12 novembre. " On ne fait plus confiance à personne. Des instructions ont effectivement été données pour assurer la sécurité des rescapés. D’autres mesures vont être prises dès demain (hier lundi, ndlr) ", a expliqué un officier supérieur de l’armée.
L’exfiltration de sept des quatorze rescapés de Bakassi intervient au moment même où l’enquête commise par le ministre délégué chargé de la Défense suit son cours, parallèlement à plusieurs autres missions d’informations diligentées par la présidence de la République. Dans le sillage de ces enquêtes, dont la première mission s’est rendue à Douala le 1er décembre dernier à 21h, Mutations a pu apprendre que l’ancien commandant de l’opération "Delta ", le capitaine de vaisseau Oyono Mveng, a subi plusieurs interrogatoires depuis son limogeage et son remplacement par le colonel Ebaka. Au cours de l’un de ces interrogatoires, dont l’un conduit par le commandant de la légion de gendarmerie du Sud-Ouest, Oyono Mveng se serait effondré, avant de suivre des soins d’urgence par la suite et de se retirer dans sa demeure à Bonaberi.
A plusieurs reprises, les enquêteurs commis par le Mindef, dont le lieutenant-colonel Tchinda et le chef d’escadron Eloundou seraient repartis bredouilles de la garnison de Douala ; tous les rescapés se refusant de leur confier ce qu’ils avaient vu le jour de l’attaque. Dans les milieux de la grande muette à Douala, certains voient derrière ce mutisme délibéré de la méfiance. Les enquêteurs susnommés étant considérés dans l’armée comme " les hommes de main du ministre ".
Silence
Selon les témoignages séparés de sept rescapés approchés samedi 15 décembre par Mutations, les officiers de gendarmerie Tchinda et Eloundou leur ont demandé de " dire à quiconque que tous les militaires du Pc3 étaient armées, qu’aucune visite officielle du commandant Delta n’avait été annoncé en dehors d’une persistante rumeur, que les embarcations des assaillants avaient été détruites…" Remis quelque peu des traumatismes qu’ils ont subis, les blessés racontent comment " trois embarcations des assaillants sont arrivés à bord à 13h45’ précisément, alors que le repas de la mi-journée venait d’être pris. Ceux de nous qui étaient en tenue ont couru pour présenter les honneurs. Ils ont tous été arrosés. Ceux qui ont accouru après avoir entendu les crépitements ont tous été tués. Certains d’entre nous sont allés se réfugier dans la fosse des toilettes ". Ces mêmes témoins affirment avoir reconnu la majorité des visages. " Un responsable même de Delta a enlevé sa cagoule en premier après avoir tiré les coups de semonce à ceux qui gémissaient".
Egalement, a-t-on appris des témoignages, peu avant sa sortie de l’intérieur du poste, le capitaine de corvette Samuel Metiegue a confié au caporal Tamsunié, qui s’occupait de l’intendance au Pc3, que " ils ont finalement osé ". Après quoi il a reçu 12 balles, tandis que le sergent-chef Ndjiomou, qui tentait de récupérer une arme des assaillants, a été arrosé de huit balles, dont une à la bouche.
Liste des 14 rescapés internés à la garnison
1) Quartier-maître Ndena
2) Caporal Halidou
3) Caporal Ebong Fils
4) Gendarme major Akam
5) Sergent-chef Kompani
6) Sergent-chef Enyegue
7) Matelot Tsopia
8) Soldat 1ère classe Hadjia
9) Caporal Minkoas
10) Quartier-maître Efio
11) Caporal Makadji
12) Caporal Nji Fidelis
13) Caporal Amba
14) Soldat 1ère classe Owon