Canton Bassa du Wouri


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L’isolement du nouveau chef supérieur se renforce

Dans la bataille pour la succession à la chefferie supérieure Bassa de Douala, les querelles restent vives, malgré l’arrêté du 31 août 2007 signé du Premier ministre et désignant Mbody Epée Gaston comme chef.

Le Ngondo récuse la désignation du gouvernement

Vendredi 14 mars dernier, les chefs traditionnels Sawa et les représentants des différentes composantes sociologiques résidant à Douala étaient réunis au cercle municipal de Bonanjo. Il s’agissait de chercher les solutions pour conjurer les démons de la crise qui a paralysé la ville de Douala en particulier lors des soulèvements sociaux de la dernière semaine de février 2008. Une absence remarquable a suscité les commentaires, celle du Chef supérieur du Canton Bassa du Wouri. Seuls cinq des six chefs supérieurs des six cantons (Bakoko, Deido, Akwa, Bell, Bele-Bele et Bassa) de 1er degré qui constituent l’ossature territoriale Sawa du Wouri, étaient conviés à cette importante assise où étaient pourtant présents quelques chefs de 3è degré. Cette absence, une de plus, du chef du Canton Bassa du Wouri dans les actions collectives de chefs Sawa apparaissait comme une exclusion définitive.
Déjà, à la suite des émeutes et scènes de guerre enregistrées dans la ville de Douala, après des marches des partis politiques et de la société civile contre la révision de la Constitution, Cameroon Tribune publiait déjà le 18 février 2008, un communiqué “ controversé ” des chefs traditionnels Sawa. Ces derniers dénonçaient la menace à la paix et à l’ordre public dans la capitale économique, mais surtout récusaient ceux qui veulent présenter la ville de Douala comme celle de la contestation. En bas du communiqué, la signature du chef du canton Bassa ne figurait pas. Mbody Epée Gaston s’était trouvé obligé de signer en solitaire un communiqué parallèle.
La position de l’Ag des chefs traditionnels Sawa est donc connue, ils ne reconnaissent pas Mbody. Ils continuent de considérer la situation à la chefferie du Canton Bassa comme une vacance de siège. Ce qui explique aussi que lors de ses assises annuelles de décembre 2007, le siège du chef du Canton Bassa du Wouri est resté vide. Cette situation provoque déjà l’indignation des élites et populations de ce canton. “ Alors que quasiment tous les dignitaires Sawa de Campo à Limbé étaient présent en ces lieux de l’évènement le dimanche 23 décembre 2007, l’on a remarqué au grand dam de ses maigres partisans, l’absence du chef administratif de ce grand canton qui occupe les 2/3 du département du Wouri ”, évoque le mémorandum des élites. Par ailleurs, ils citent une réaction du secrétaire général du Ngondo lors de l’émission “ La Grande tribune ” sur Equinoxe télévision. “ Le Ngondo a fait son travail, il n’est pas responsable du désordre qui prévaut dès lors que la démarche exposée aux autorités n’a pas été suivie. En tant que gardien des traditions Sawa, le Ngondo ne peut pas accepter que celles-ci soient bafouées. ”

La famille régnante fait son choix
On apprend que pour le “ Ngondo ”, la famille Lognyuk de Ndogbong est reconnue comme famille régnante du Canton Bassa du Wouri depuis l’instauration de cette chefferie. A ce titre, il lui appartient de choisir un chef parmi ses enfants habilités à s’asseoir au trône afin de le présenter aux chefs des 23 villages du canton et à l’administration. Suivant ces directives, la famille Longnyuk, à laquelle appartient Sa majesté Mbody Epée Gaston, s’est réunie il y a deux mois et a désigné Mbody Samson, par ailleurs trésorier du “ Ngondo ” comme étant son choix et au pire des cas comme étant son candidat à une éventuelle élection dans le Canton, à en croire Eyoum Daniel, chef de la famille Lognyuk. Face à cette position, toutes nos tentatives d’obtenir une réaction de Sa majesté Mbody Epée Gaston, chef supérieur désigné par l’administration se sont soldées par un échec. Il nous a fait dire qu’il nous contactera par l’intermédiaire de son chargé de la communication qui n’a toujours pas fait signe.
En revanche, le collectif des chefs conteste le principe d’une famille régnante dans ce canton et plaide pour une élection démocratique. En attendant, ils annonce la désignation d’un “ N’hom ”, entendez patriarche qui sera “ chargé de veiller au respect des us et coutumes du peuple Bassa du Wouri ” afin d’assurer cette période transitoire. Le mémorandum dans lequel est contenue leur position précise qu’il “ sera l’émanation d’une large concertation des chefs traditionnels, des notables, de élites et forces vives des vingt trois (23) villages qui composent le canton Bassa du Wouri. ”
Mauvais jeu des autorités
Toutefois, les autorités administratives des arrondissements de Douala IIIè et Vè sur lesquels s’étendent les limites territoriales de ce canton multiplient des actions pour l’imposer devant la résistance des populations. C’est ainsi que depuis le début d’année, elles ont opté de faire de lui un membre de leur délégation à chacune de leur sortie, même lorsqu’il s’agit d’une manifestation dans son canton où il devrait les accueillir. “ Nous constatons que vous tenez à nous l’imposer en l’admettant dans vos rangs chaque fois qu’une opportunité s’est présentée… Vous êtes sans ignorer qu’il a été rejeté par le peuple Bassa dans sa plus grande majorité ”, dénonce le collectif des chefs traditionnels du 3è degré des villages du canton Bassa du Wouri. “ Une démarche malicieuse, qui consiste, soit de le faire accepter progressivement par les populations, soit de faire croire à la haute hiérarchie à partir des cameras des télévisions qu’il est finalement accepté ”, insinue un patriarche du Canton. Pour mettre fin à ce jeu, ce collectif a adressé en date du 2 janvier 2008 une mise au point aux autorités administratives des arrondissements de Douala IIIème et Vème incriminées. Et les chefs de 3ème degré de conclure : “ Par souci de l’ordre public dont vous êtes le garant, la sagesse nous recommande de vous demander d’éviter désormais de l’admettre dans vos délégations comme chef supérieur du canton Bassa du Wouri ”.

Farouche opposition des populations
Il faut dire qu’à plusieurs reprises déjà, l’installation du chef supérieur du Canton Bassa a été annoncée et reportée. C’est une lapalissade de dire que le canton Bassa du Wouri Douala est dans une vive tension depuis la désignation de Mbody Epée Gaston comme chef supérieur de 1er degré par un arrêté du Premier ministre, Ephraïm Inoni, en date du 31 août 2007. Aussitôt, il y a eu une levée de boucliers d’une majorité des vingt trois (23) villages qui composent le Canton et même des populations pour contester cette désignation qu’ils ont qualifié d’illégale. Ils ne sont pas allés du dos de la cuillère pour saisir les autorités compétentes et même la plus haute hiérarchie de l’Etat pour dénoncer cette désignation “ arbitraire ” qu’ils disent n’être pas le résultat des élections du conseil des sages essentiellement composé des vingt trois (23) chefs de villages.
Pour exprimer ce désaveu, lors des manifestations heureuses ou malheureuses dans le Canton, S.M. Mbody Epée Gaston n’est jamais invité en tant que chef, et lorsqu’il y prend part, il est tout simplement ignoré. Les quelques tentatives de prises de paroles se sont toujours soldées par des actes d’agressivité. C’est le cas de l’incident survenu il y a un quatre mois aux obsèques d’un de ses cousins Dikous Samuel (alias Jacquinot). A l’occasion, il a été interdit de parole en qualité de chef. Dans un tel climat et devant de pareils imbroglios qui frisent même des soulèvements, les autorités tardent à programmer son installation. Les populations du Canton Bassa du Wouri ont même annoncé le blocage du carrefour Ndokoti au cas où les autorités administratives voudraient au forceps essayer de programmer cette installation. Au demeurant, la réaction de SM Mbody Epé qui reste attendu au Messager pourra donner un autre éclairage de la situation.
 

Par Mathieu Nathanaël NJOG
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