Quand les débats ennuient les députés Rdpc
On a enregistré au cours de la séance plénière d’hier un dizaine d’interventions. Elles sont venues en majorité des députés du Rdpc. Lesquels ont servi le même langage à l’assistance. A savoir : souscrivez sans réserve à la modification de la Constitution. Mais alors, à force de redire la même idée avec presque les mêmes mots, on fini par se lasser. Et c’est ce qui est arrivé aux élus du parti au pouvoir qui ont fini par déserter l’hémicycle pour aller tailler la bavette dans la salle des pas perdus. Pendant que des orateurs se succédaient au pupitre.
Haman Adama distribue du chocolat
Les débats ont duré plus de 8h. Pour les membres du gouvernement présents à l’hémicycle, cela pouvait paraître ennuyeux. Le ministre d’Etat Marafa est sorti dans le couloir tirer une bonne bouffée de cigarette avant de revenir prendre sa place. Constatant certainement la fatigue qui commençait à gagner ses collègues ministres dont la plupart ont quitté leur cabinet bien avant l’heure du déjeuner, madame le ministre Haman Adama, a sorti de son sac un sachet de bonbon chocolat qu’elle a maternellement fait distribuer aux membres du gouvernement. Tels des gamins, ils ne se sont pas privés du plaisir de prendre cette espèce de remontant.
L’Assemblée nationale militarisée
L’accès à l’enceinte de l’Assemblée nationale était suffisamment filtrée hier. Les contrôles pour les journalistes accrédités étaient encore plus rudes. Les hommes des médias, surtout ceux du privé étaient palpés jusque parfois dans les parties intimes. On distinguait ainsi plusieurs contrôles avant l’ultime guérite. Et une fois dans la cabine presse assaillie par les membres du personnel de l’Assemblée nationale, des "gorilles" en civil tenaient à l’œil les journalistes. Comme si ceux-ci avaient les moyens de s’opposer à quoique ce soit. Et à l’extérieur du bâtiment, policiers, militaires, gendarmes armés de matraques se tenaient prêts. Au cas où…
Les membres du corps diplomatique aux abonnés absents
Les chaises généralement réservées aux membres du corps diplomatique sont restées vides hier à l’hémicycle. C’est vrai qu’on a aperçu à un moment donné l’ambassadeur d’Arabie Saoudite. Qui est d’ailleurs le seul ambassadeur plénipotentiaire accrédité à Yaoundé présent dans la salle. Mais ce dernier bien isolé, n’a pas pu suivre les débats jusqu’à la fin. Il est parti. Bien curieuse manière pour les représentants de ces pays “ amis ” d’être absents à un moment aussi important de l’histoire du Cameroun. Toute l’Union européenne était absente hier. Les Américains aussi. Même nos amis Chinois n’ont pas envoyé de représentant à cette séance plénière historique. Et si c’était en signe de désapprobation ?
Ndongo Essomba vote “ transparent ”
Le président du groupe parlementaire Rdpc a voulu montrer l’exemple hier à ses collègues députés lors du vote. Prenant l’enveloppe qui lui a été remise par un huissier, et alors que son nom était appelé en première position par le secrétaire général de l’Assemblée nationale, le député Rdpc de la Lekié, a sorti le bulletin vert symbole du oui, pour le montrer à tous avant de le remettre dans l’enveloppe et le jeter dans l’urne transparente. Cela s’appelle voter transparent. C’est ce qu’il a voulu faire comprendre à ses camarades. Malheureusement, son exemple n’a pas été suivi.
Adama Modi surveillé ?
Lorsque le nom du député Adama Modi a été appelé au moment du vote, à chaque fois, tous les regards étaient tournés vers lui. Conscient du fait qu’il constituait une attraction, l’élu du Mayo Kani Nord se livrait à un spectacle qui a suscité des éclats de rire dans l’hémicycle. Il jetait ainsi de manière ostensible son bulletin dans l’urne en levant les mains par la suite. Un peu comme pour dire que, "je ne suis pas contre, vous avez vu non ?". De toutes les façons, les responsables de son parti semblaient bien l’avoir à l’œil.
La chaise vide du Sdf
Le Sdf n’a pas prix part au vote. Les représentants de cette formation politique ont quitté l’hémicycle un peu avant l’ouverture des débats. Joseph Banadzem, le président du groupe parlementaire, a estimé que le projet de loi discuté en commission était différent de celui dont copie a été remise à tous les députés en plénière. Il veut introduire une question préalable. Son vœu est rejeté en bloc par les députés du Rdpc au terme d’un vote à main levée. “ Nous ne sommes pas prêts à prendre part à ce débat ”, lâche Mbah Ndam, vice-président de l’Assemblée nationale qui s’inscrit “ en faux ”. Les députés Sdf quittent donc la salle. “ Nous n’allons pas assister à cette fraude ”, psalmodie Mbah Ndam en quittant la salle. “ C’est aussi ça la discussion. Quand on est minoritaire, on accepte la loi de la majorité ; on ne refuse pas le débat ”, lance Cavaye Yéguié Djibril, le président de l’Assemblée à l’endroit des élus du Sdf. Le vote du projet de loi a donc eu lieu en l’absence de ce parti qui a fini par ériger la politique de la chaise vie comme mode de contestation. Les députés du Rdpc ont rappelé que le Sdf rejette la modification de la Constitution de 1996 alors que lors de l’adoption de ce texte, les parlementaires de ce parti politique avaient claqué la porte.
Le vote n’est pas secret
Le règlement intérieur de l’Assemblée nationale du Cameroun comporte des dispositions qui font quand même rigoler. Le texte prévoit qu’en cas de vote pour départager les députés sur un texte à adopter, qu’on remette trois bulletins de vote à chaque parlementaire aux couleurs du drapeau du Cameroun. La signification de ces couleurs lors des dépouillements: Le vert représente le vote favorable ; le rouge symbolise le vote défavorable, et le jaune signifie que l’on s’est abstenu. Chaque parlementaire reçoit donc ces trois bulletins de vote avec une enveloppe blanche. Et chaque bulletin de vote porte le nom du député. Au terme du dépouillement, les bulletins de vote sont transmis au secrétaire général de l’Auguste chambre. La suite : il lit les noms et les choix que chaque parlementaire a effectué. Dans ces conditions d’ordre réglementaire, est-ce qu’un député du Rdpc pouvait faire un choix différent de celui de Cavaye Yéguié Djibril ou de Jean Bernard Ndongo Essomba, sachant que son nom allait être lu comme celui qui s’est opposé à la volonté du chef de l’Etat et partant du parti ? Même le téméraire Adama Modi n’a pas pu ramer à contre courant. Car le vote n’est pas secret.