Comme un éclair rageur dans un ciel orageux, le dernier opuscule d’Atéba Eyene est venu désigner l’élite de sa région à la sagacité de l’épervier ; en la rendant responsable du sous-développement (?) de leur (?) région. Dans une réplique non moins cinglante, une élite de cette région (?) a entrepris de démontrer que la république était une et indivisible et que toutes les régions étaient logés à la même enseigne. Qu’elle ait vu naître ou non le premier des Camerounais. C’est dans un tel contexte que des étrangers (?) ont cru devoir pousser une autre ethnie dans la polémique en remettant au goût du jour les clichés et stéréotypes construits en son temps par les colons pour nourrir la mécanique infernale de spoliation des peuples africains qu’il fallait affaiblir en divisant. En diabolisant un groupe, on en faisait le pôle différentiel faisant fonctionner le système. La polémique aurait-elle pour ambition d’empêcher la clarification idéologique ? Atéba Eyene met en avant des concepts tels que :
Elite et développement –Développement qui lui-même doit être défini ; est-ce la promotion d’une forte élite politico-administrative dans une région ou l’amélioration des conditions de vie de la population de la région qui fait le développement ? Et parlant de l’élite, une élection au fondement nébuleux peut-elle faire d’un vaurien un sage ? En d’autre terme, les critères présidant à l’élection ne sont-ils pas déterminants dans l’onction de l’élite ?
La planification ethnique : Gène de la médiocratie ou source d’équilibre ethnique dans une sorte de pax pauvreta ? Du genre : On croupit tous dans l’enfer de la misère source de violence. Mais il n’y aura pas de guerre ethnique entre nous parce que nous sommes équitablement (?) représentés dans l’arche de Noé par nos congénères. La violence sera intra-ethnique, crapuleuse, épousera tous les contours que vous voudriez mais il ne sera pas dit que nous avons suivi l’exemple rwandais.
Développement autocentré : Légitimation des particularismes régionaux avec ses élites régionales ou modèle de construction concentrique d’une république par des élites nationales d’horizons ethniques diverses.
Il y a comme ça dans l’air du temps de grosses interrogations, traitées malheureusement de façon superficielle, alors même que leur clarification est consubstantielle à notre projection dans le temps. Est-ce le contexte de lutte contre la corruption qui introduit le biais de la passion dans l’argumentaire des uns et des autres ?
Il y a quelques années, répondant à Hervé Nkom qui demandait pour sa région bassa un morcellement administratif comparable à celui de l’ouest du pays, Shanda Tonme lui suggérait de demander plutôt pour sa région un tissu de Pme comparable à celui de sa référence. Et c’est bien des années plus tard qu’Atéba fait sienne ce conseil en demandant aux populations de sa région de “ demander dorénavant des écoles, des routes des hôtels et non des DG et autres ministres ”. Et apparemment, “ la révélation ” fait courir des foules dans cette région et séduit les Camerounais. Je crois que là est le vrai échec de l’Etat camerounais : avoir laissé une masse si importante de nos concitoyens se fourvoyer sur ce qu’était le développement. Haro donc sur le système éducatif ayant laissé perdurer une telle ignorance. Pour comprendre la responsabilité des uns et des autres dans ce fiasco, peut-être faille-t-il partir du rôle de l’Etat.
Au sein d’une nation moderne, le rôle de Etat peut se résumer à amener la société à un point de plein emploi. Ceci sous entend trois axes prioritaires d’action :
Une population créative donc formée
Des ressources humaines en possession de leur moyen physique donc en bonne santé.
La mise à disposition de ces intelligences physiquement au point des moyens de matérialisation de leur créativité : le crédit
Evidemment tout ceci n’est faisable que par un Etat fort, reposant sur une ossature sécuritaire assujettie au peuple, un cadre légal inspirant confiance et garantissant l’égalité de tous devant la loi. Tel est-il le cas chez nous ?
L’Etat post colonial avait-il ces caractéristiques ? Une littérature abondante a été consacrée à la question. Nous n’y reviendrons pas. On peut cependant constater que l’Etat en Afrique est loin de jouer avec effectivité ce rôle. Pour expliquer cet échec, différents diagnostics ont été émis sous plusieurs noms de code : Mauvaise gouvernance, corruption d’une élite – prédatrice (?) –, malédiction des matières premières, atavisme nègre, etc. Des thérapies ont été aussi implémentées : démocratisation, privatisation, Pas avec au sortir des stratégies de lutte contre la pauvreté de masse (Dsrp). A se demander si la situation s’améliore ou se détériore.
Le président Biya, du haut de ses 25 ans de pratique du pouvoir, semble convaincu que la corruption est pour une grande part responsable du plombage de ses grandes ambitions contenues dans “ Pour le libéralisme communautaire ”. Il s’est donc promis de léguer à la postérité un Etat de droit débarrassé de cette peste. Son opposition conventionnelle hésite encore à l’aider mais applaudit. Bien évidemment, la thérapie fait des gorges chaudes et des résistances s’organisent. Pouvait-il en être autrement quand on sait où il a dit que “ ceux qui ont joué avec la fortune publique devaient rendre gorge ” ? Ceci ne doit pas faire perdre de vue la portée pédagogique de l’opération. Voilà pour la responsabilité de l’Etat et le correctif que son chef entend y apporter. Quid des autres intervenants ?
Nous avons vu que dans les actions essentielles de l’Etat, figurait la mise à disposition des créateurs des moyens de production au travers le crédit. Face à la faillite de l’Etat dans cette mission, Atéba attendait que ce soit les élites qui aident les jeunes de leur région à avoir les moyens pour exprimer leur talent. Les élites devenant des thaumaturges devant trouver des places dans les grandes écoles, offrir les médicaments, nourrir et vêtir les leurs. A moins de détourner toutes les ressources de l’Etat, on ne voit pas comment ils pouvaient le faire. Les avocats des victimes de l’épervier ont là matière pour leur plaidoirie.
Dans ce cas précis, est-ce l’Etat qui a failli où les structures financières à qui il a confié comme partout ailleurs son droit seigneurial ? En effet, comment comprendre que dans un pays où tout est à faire on puisse entendre des absurdités du genre “ les banques sont surliquides ”. Comme cette monstruosité “ d’excédent budgétaire ” dans ces pays aux écoles étroites et aux hôpitaux peu opérationnels.
Est-ce la peur de répondre de cette responsabilité devant l’histoire qui explique que les financiers locaux se crêpent le chignon à la faveur des vols de l’épervier ?
Un financier parmi les plus en vue de la place pense que “ des ennemis de l’ombre ” se servent de la presse pour l’impliquer dans une opération de laquelle il a été court-circuité du cœur du système. Il est sous le feu nourri d’une partie de la presse amenée par un titre propriété d’un autre financier. L’opération épervier donnerait-il prétexte à une nuit de longs couteaux dans le landerneau financier ? J B Sipa pense que “ les intérêts du président dans l’affaire Albatros avaient été confiés à quelqu’un de la périphérie qui s’est fait évincer de l’intérieur sans que le président ne s’en rende compte. ”. Y a-t-il un lien entre cette sortie et le cliché “ d’affairiste ” qui a récemment été sorti des placards pour désigner l’ethnie de l’attaqué ? Ça va dans tous les sens !
Une constante : l’insuffisance des financiers dans leur rôle social de financement de l’économie est aussi responsable de la pauvreté de masse que nous vivons avec à la clé la détérioration du climat social. Toute chose qui, combinée à l’ignorance, a fait le lit des pressions sociales ayant poussé une partie de l’élite à succomber à la tentation des détournements au nom du clan et de la région. Alors Messieurs, trêve de distraction ! L’essentiel est ailleurs.





